Eric Clapton

 

  

 

            Eddy Mitchell aurait pu dire "Mes bien chers frères, mes bien chères soeurs, reprenez avec moi tous en coeur, Dieu est sur terre". Mais le Dieu dont je parle est God, le dieu de la guitare, le Allah de la Fender, le Bouddha de la Gibson, l'enfant prodige du blues: de son vrai nom Éric Patrick Clapp, alias Eric CLAPTON.

Qui aurait deviné que ce fils d'une anglaise et d'un père alors inconnu, élevé par sa grand-mère puisse devenir ce guitar hero. Certainement pas sa grand-mère qui lui offrit sa première guitare acoustique, une Spanish Hoya, et le vit rapidement la délaisser au bout d'un an et demi tant le son était mauvais. Heureusement le miracle eût lieu au détour de l'acquisition de sa première guitare électrique. Eric retrouvait enfin les sonorités de ses idoles Muddy Waters, Big Bill Broonzy et Robert Jonhson. Mais acquérir la technique était une autre histoire. Aussi décide-t-il d'abandonner ses études des beaux arts, puis de s'enfermer dans sa chambre pour écouter les pères du blues lancer leur litanie au fil des vinyles, et enfin tester son apprentissage sur scène avec les Roosters, puis les Yardbirds. Essai transformé puisqu'en 1964 il fera avec ces derniers quatre premières parties des Beatles.

Éric a toujours rêvé de devenir un bluesman des temps modernes et de faire partager sa passion des chants noirs américains. Aussi quittera-t-il les Yardbirds qu'il juge trop rock après le succès de "Good Morning Little Schoolgirl", pour John Mayall et ses Bluesbreakers où il peaufinera sa culture du blues. C'est à cette époque que commencent à fleurir sur les murs de Londres des tags aux "Clapton is God". Sur ce sujet Eric déclare: "Ça ne me fait ni chaud ni froid. J'y voyais bien sûr un compliment mais je trouvais la chose débile. Je ne comprenais pas comment les gens pouvaient prendre cela au sérieux. C'était très sympathique et en même temps ridicule". Il rejoindra ensuite Cream où il retrouve Jack Bruce et Ginger Baker. Comme le dit Éric: "le principe de Cream était au départ des chansons dans lesquelles nous aménagions de grands espaces pour voir ce que l'on pourrait jouer sur scène, très largement délirer et improviser". Bien que le groupe acquière une notoriété mondiale, c'est justement cette pagaille qui pousse Clapton à aller vers de nouveaux horizons. Le fantôme du bluesman qui le hante le conforte dans cette décision. Après un rapide passage chez Blind Faith, où il compose sa première vraie chanson "Presence of the Lords", et Delaney & Bonnie, EricClapton fonde son premier groupe Derek and The Dominos. Là tout va s'accélérer puisqu'il va déclarer sa flamme à Pattie Boyd, alias Pattie Harrison la femme de George, au travers de la légendaire chanson "Layla"; mais il va également se fourvoyer dans la drogue et l'alcool. Grâce à une cure de désintoxication par électro-acuponcture et l'aide de ses amis, notamment Pete Towshend, il revient partiellement sur le devant de la scène. Avec "461 Ocean Boulevard" et les albums suivants, Slowhand témoigne d'un éclectisme musical: country, rock, slowet reggae sont au rendez-vous. On entend le fameux "I shot the sheriff" qui révèle le prince du reggae Bob Marley. La fin des années 70 et la décennie 80 se résument en une suite d'albums commerciaux, avec la participation de Phil Collins et Tina Turner, de bandes originales "Retour vers le futur", l'Arme fatale" et de concerts le plus souvent de bienfaisance.

Alors qu'il perd Connor son fils, fruit de son deuxième mariage, EC renaît: chagrin et désespoir sont traduits en musique et donnent le jour à "Tears in heaven" et "Circus". Puis une chance formidable s'offre à lui, MTV lance une nouvelle émission musicale live. Il répond présent. "Unplugged" révèle alors aux jeunes un guitar hero inconnu et montre aux moins jeunes que le phénix du blues vient de renaître de ses cendres. Il profite alors de cet engouement pour enfin réaliser son rêve: faire un album de blues. "From the cradle" emmènera les fans d'Eric au nirvana. Il n'y a pas de doute, Clapton a des doigts de fée. Elles caressent les cordes tandis que les auditeurs vibrent au rythme de celles-ci. Quatre ans plus tard, God surprend à nouveau en s'associant avec Simon Climie. Sur "Pilgrim" il invente le blues du prochain millénaire: une pincée de boîte à rythme, un doigt de sentiments dans les paroles, une dose de guitare et une performance vocale. Mélange de styles, techno, jazz, rock, Eric marie savamment les différentes évolutions du blues. Résultat: une moyenne de plus d'un Grammy Award par an, et l'entrée au Rock Hall of Fame. Mais ce n'est pas pour autant qu'Eric Clapton trace un trait sur son passé. Bien au contraire, il vient de se nous montrer que l'élève a dépassé ses maîtres, mais qui plus est, il veut diffuser la parole divine. La cinquantaine passée, il veut se repentir, se faire pardonner ses péchés, comme si sa dernière heure était venue. Il crée ainsi un centre de désintoxication, le Crossraods Center, aux Caraïbes, et milite activement contre l'usage de stupéfiants: "Bien entendu je regrette tout ce temps perdu à boire et à me droguer. Mais je pense que sans cela je ne serais pas où j'en suis aujourd'hui. Vous savez les drogues ont énormément d'impacts, et beaucoup de gens doivent en prendre avant de se rendre compte que ce n'est pas une bonne idée. Quant à dire que j'en avais besoin pour être créatif, c'est faux, bien que je l'ai cru à l'époque. C'est ça le piège ou l'illusion de la drogue, à te faire croire que tu ne peux créer sans elle. Ce qui est bidon. Je suis quelqu'un de très créatif avec ou sans drogue."

Alors je vous le dis mes frères et mes soeurs, il n'y a pas des religions dans le monde, il y a une religion qui peut unir tous les peuples de la terre: celle de la musique. Elle serait sans doute polythéiste et l'un de ses dieux serait Eric CLAPTON